L’Association Nationale des Médiateurs a 30 ans !

 

L’ANM a célébré fièrement son 3Oème anniversaire !

 

 

En tant que l’une des plus anciennes associations de médiateurs, l’ANM – Association Nationale des Médiateurs – incarne la diversité de la médiation et s’efforce constamment d’élargir ses horizons.
Le 17 novembre 2023 se tenait un grand événement, dédié à toutes les médiatrices et les médiateurs, adhérent.e.s ou non, à la Bellevilloise, un Centre artistique et culturel situé dans le 20ème arrondissement de Paris.

De la pluralité des voix à l’harmonie : l’écologie de la relation

Basé sur ce thème De la pluralité des voix à l’harmonie : l’écologie de la relation, cette journée d’anniversaire, à la fois festive et profonde, célébra la diversité en accueillant des intervenants venant d’horizons multiples, qu’ils soient régionaux, nationaux ou internationaux.

 

Interventions marquantes

Voici quelques extraits des interventions qui ont marqué cette journée de célébration des 30 ans de l’ Association Nationale des Médiateurs.

Intervention de Boris Cyrulnik

Qu’est-ce que la résilience ? – Un processus qui permet aux blessés de la vie de déjouer tous les pronostics.. (…) La résilience est née par l’action de John Baez en soutien des soldats engagés dans la guerre du Viêt-Nam.
Pourquoi la médiation peut permettre d’aider des personnes cabossées de la vie ? Elle soutient et donne sens (par la compréhension).

Intervention de Georges SALINES

Georges Salines est le fondateur et président d’honneur de l’association 13Onze15 Fraternité et Vérité. Il est le père de Lola, qui, à 28 ans, a été victime du terrorisme au Bataclan. Il évoque dans son ouvrage Il nous reste les mots son dialogue apaisé avec Azdyne AMIMOUR, le père d’un des 3 assaillants.

Intervention de Fatima EZZARHOUNI

Fatima est la fondatrice de l’association Society Against Violent Extremism (Anvers, Belgique). Elle est mère de 3 enfants. Son fils aîné est parti en Syrie à l’âge de 18 ans et il est décédé là-bas.

Extrait de son témoignage :

(…) Après 2 ans de deuil, je ne peux pas rester comme ça. Je suis dans un monde et je ne suis pas toute seule, j’ai 2 enfants, une famille, des amis. Donc j’ai commencé à faire de la prévention contre le terrorisme pour ne pas que ça arrive aux autres. Je me sentais coupable envers Georges SALINES. Même si ce n’est pas mon fils qui était auteur de l’attentat du Bataclan, il a intégré des groupes terrroristes et notamment l’État islamique. (…) On me donnait le nom « maman de … ». Je n’étais plus Fatima. (…) Nos points communs à Georges SALINES et moi, c’est la souffrance de perdre un enfant. (…)
La résilience, c’est un travail de paix, d’humanité. Ce n’est pas facile. Je n’ai cessé de tomber puis de me relever, notamment après les nombreuses fois où on m’a dit : ton fils est mort, puis un démenti, non il est vivant, puis à nouveau il est mort, puis j’apprends plus tard que c’est faux, et ainsi de suite. (…)  Il a écrit une dernière lettre avant de mourir où il demande pardon.
Aujourd’hui, je continue mon travail de justice restaurative .

Quelques questions posées par la salle

Est-ce que vous mesurez l’efficacité de vos interventions auprès des personnes en milieu carcéral ?
Georges explique son action dans les PPRV (Programmes de Prévention de la Radicalisation Violente) : On est invité en tant que grand témoin pour raconter notre histoire aux prisonniers. Effectivement, la question de l’évaluation de nos interventions se pose. (…)  J’ai fait des rencontres restauratives qui demandent une très longue préparation avec des médiateurs-trices. J’ai rencontré 2 des membres de la cellule terrorisme de l’État islamiste ainsi qu’un autre membre que j’ai rencontré 2 fois et avec qui je suis toujours en correspondance aujourd’hui.
Fatima poursuit : Si déjà les prisonniers demandent à me voir, c’est déjà un impact. Quand les prisonniers me voient, ils voient leur mère et me disent qu’ils prennent conscience du mal qu’ils ont fait à leur mère.

Intervention de Jean-Edouard GRESY, anthropologue, fondateur et associé du cabinet ALTERNEGO

La relation entre les êtres est toujours une question de dons et de contre-dons. Je te donne, tu reçois, et en retour tu me donnes, j’accepte ou je refuse le don, le contre-don. Notre relation à l’autre est faite d’une succession incessante et permanente de dons et de contre-dons qui circulent. Toute la « palette » de l’acceptation ou du refus, dans les deux sens, est possible. Il y a ceux qui donnent trop, pas assez, ceux qui reçoivent trop, pas assez, ceux qui refusent de donner, de recevoir, etc.
« Quand on aime, on ne compte pas » …. mais seulement quand on aime …
Le don et le contre-don est parfois tel qu’on ne sait plus qui donne, qui reçoit et combien. « Mais quand on ne s’aime plus, c’est là qu’on compte ». C’est là qu’il y a « maldonne », le don mis à mal. On dit bien « on règle nos comptes ».
Effectivement, c’est quand des grains de sable surviennent dans ces échanges de dons et contre-dons que le conflit peut naître et que la médiation peut aider à rétablir la relation.
En médiation, je dis souvent « Quand ça allait bien, qu’est ce qui était bien ? » On s’aperçoit que c’est toujours une succession de dons et de contre-dons qui circulaient. Quand ça ne marche plus, on essaie de voir là où le don ne circule plus. Tous les ratés du don, les maldonnes, doivent être expliqués en médiation pour avancer.
Je pose aussi la question : « Qu’est ce qui fait que demain on reprend notre relation, on se donne une nouvelle chance ? »
Ce qui est complexe dans le don c’est qu’il doit obéir à 2 règles :
• c’est l’inconditionnalité,
• je ne compte pas ».
Restaurer la relation, c’est restaurer notre capacité au don et au contre-don en acceptant ces 2 règles.